L’Union des Comores s’était fixé un objectif ambitieux, d’éliminer le paludisme d’ici fin 2025. Pourtant, l’île de Ngazidja concentre aujourd’hui l’essentiel du fardeau, avec plus de 98% des cas enregistrés depuis le début de l’année, révélant les fragilités du système de prévention et de lutte contre la maladie.
Selon nos confrères d’Al-watwan, entre janvier et juillet 2025, 29 366 cas ont été recensés dans tout l’archipel, selon les données du Programme national de lutte contre le paludisme (PNLP). Ce chiffre représente déjà plus de la moitié du total de l’année précédente et traduit une recrudescence inquiétante. Mais derrière cette progression, une réalité s’impose : Ngazidja, à elle seule, porte presque tout le poids de l’épidémie, avec 98,28% des cas. « Le palu n’est pas une maladie à prendre à la légère », alerte la coordinatrice du PNLP, Dawiya Mohamed, rappelant qu’il reste l’une des principales causes de morbidité aux Comores. Trois décès ont déjà été confirmés depuis janvier, dont deux sur l’île. À titre de comparaison, Ndzuani n’enregistre que 1,14% des cas et Mwali à peine 0,58%. Cette disparité met en lumière les spécificités environnementales, démographiques et sanitaires de chaque île.
Ngazidja, plus densément peuplée et urbanisée, offre aux moustiques de multiples zones favorables à leur reproduction. « Beaucoup de familles vivent à proximité de zones humides ou de rivières stagnantes, ce qui favorise la prolifération des moustiques », explique un agent de santé communautaire de Moroni. « Le manque d’assainissement et l’insuffisance de moustiquaires traitées aggravent encore la situation. » Pour les malades, l’épreuve est difficile. « Quand on a le palu, c’est tout le corps qui s’écroule », raconte Saïda Karihila, de Mitsoudjé. « On a de la fièvre, des frissons, on ne peut plus travailler ni même s’occuper des enfants. » La peur est désormais palpable dans la population. « Chaque fois que mon fils tousse ou qu’il a de la fièvre, je redoute que ce soit le palu », confie Ali Soulé. « On vit avec cette inquiétude permanente. » D’autres, au contraire, insistent sur la prévention et la réaction rapide. « Le palu peut être mortel, mais on peut l’éviter », estime Housni Msa. « Dormir sous une moustiquaire, nettoyer autour de la maison, aller vite au centre de santé : ce sont des gestes simples mais essentiels. »
Le ministère de la Santé assure de son côté rester déterminé à atteindre l’objectif du « zéro paludisme » d’ici fin 2025. Les autorités misent sur une intensification des campagnes de sensibilisation et une mobilisation accrue des communautés. « L’engagement remarquable du personnel médical et des citoyens est déjà visible », affirme Dawiya Mohamed. Mais, selon elle, des efforts supplémentaires sont indispensables, surtout à Ngazidja où la propagation reste la plus préoccupante. Car la victoire contre le paludisme ne dépend pas seulement des hôpitaux et des structures sanitaires. Elle repose aussi sur l’action quotidienne des familles et des communautés : utiliser les moustiquaires, assainir les espaces de vie et réagir rapidement aux premiers symptômes. L’objectif d’éradication totale d’ici fin 2025 demeure possible, mais la bataille se jouera à Ngazidja. Sans une riposte renforcée sur l’île, le pari risque d’être compromis.
Mohamed Ali Nasra
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